Est-ce que les employeurs devraient se méfier de ces employés qui semblent changer souvent d’emploi?
Dans l’environnement actuel, il arrive parfois que les candidatures que nous recevons pour des postes cadres, aient un historique récent de changement. Or plusieurs employeurs y voient là une source importante de préoccupations. Ils ont tendance à considérer que le candidat est le seul responsable de ce changement de poste un peu trop récent et peuvent avoir tendance à l’évaluer négativement. Mais, dans le marché d’aujourd’hui, j’estime qu’il est important de nuancer, car :
1. La grande demande génère parfois des erreurs
Nous constatons actuellement, dans certains cas, une accélération notable des processus de recrutement. Cela explique la rapidité avec laquelle un candidat qualifié et compétent peut se trouver un nouveau poste. De nos jours, les planètes peuvent s’aligner pour que les cadres et professionnels puissent se retrouver un boulot en quelques semaines. Comme plusieurs employeurs font face aux mêmes candidats qu’ils tentent d’embaucher, il arrive que ceux-ci se désistent après avoir accepté une autre offre. Les employeurs las de se faire damer le pion se sont adaptés et ont réduit au strict minimum les étapes du processus de sélection. Plus l’employeur a été échaudé, plus il est susceptible d’agir avec précipitation. Dans ce contexte, de nombreuses erreurs peuvent survenir, et embaucher la mauvaise personne entraîne souvent son départ précipité.
2. Les candidats sont sursollicités et les opportunités abondantes
Il y a surenchère des postes disponibles actuellement. Dans certains milieux, notamment pour les professionnels et les cadres, la demande est incessante. C’est particulièrement le cas en informatique, en gestion des ressources humaines ainsi qu’en finances/comptabilité. Dans ce contexte, les organisations rivalisent d’ingéniosité pour faire connaître leur offre, leurs conditions de travail et sont constamment à rechercher des façons d’entrer en contact avec des candidats potentiels. D’ailleurs, plusieurs publicités qui ne visaient jusqu’ici qu’à trouver des clients deviennent aussi des occasions de faire connaître l’organisation aux candidats potentiels. Il en résulte que des candidats qui, en d’autres circonstances, n’auraient pas envisagé changer d’emploi finissent par se laisser tenter.
3. Les employeurs désespérés font de la survente
Pour l’employeur qui a trop longtemps souffert de l’impact d’un poste vacant, la tentation d’embellir le contexte ou d’omettre de mentionner des difficultés importantes ou des défis hors normes est grande, involontairement ou non. On ne veut pas « perdre » un bon candidat.
“Joindre une équipe de feu – Travailler pour une organisation qui place votre bien-être au sommet de ses priorités – Des vacances illimitées – Une prime de signature de plusieurs milliers de dollars – Des bureaux bucoliques où l’on vous masse sur votre chaise en vous servant un matcha latté comme vous les aimez.”
Ça vous dit quelque chose?
L’employeur peut ainsi devenir très attractif et, consciemment ou non, précipiter une décision et générer un désenchantement rapide chez la nouvelle recrue. Il s’ensuit alors soit un départ ou une démission silencieuse.
En conclusion, les efforts mis pour inciter les employés à considérer une nouvelle option, de meilleures conditions ou une nouvelle organisation fonctionnent. Peut-on, paradoxalement leur en tenir rigueur? Un changement d’emploi doit-il être perçu comme une preuve d’instabilité ou simplement le reflet d’un désir légitime d’optimiser sa « valeur » professionnelle? Dans ce contexte, quelle devrait être la norme? Quel rythme de changement d’emploi devrait nous inquiéter lorsque vient le temps d’analyser une candidature?
L’emploi, jusqu’ici un bien précieux, est devenu une commodité, facilement remplaçable. Alors que changer d’emploi était un exercice fastidieux, dans certains cas, maintenant quelques clics sur un téléphone peuvent suffire. Il ne faut pas se surprendre de cette grande fluidité de la main-d’œuvre, il faut plutôt en prendre acte et s’y adapter, car c’est l’une des caractéristiques importantes du marché du travail actuel.